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Photo du rédacteurAlain Mihelic

Travail des Femmes en Russie Tsariste et en URSS

Dernière mise à jour : 9 oct.


Lors de mes premiers séjours sur chantier pétrolier en Sibérie, le rôle d’opérateur, pour la spécialité qui était la mienne, était tenu par des femmes. Nous étions en 1991. Étonnement, car meme si je ne maniais pas des tonnes de ferraille pendant toute la journée, le boulot était suffisamment dur, en particulier au niveau du stress, des nuits de veille à contrôler les circuits, de la difficulté à faire bouger les équipes de gros bras, à être toujours prêt sur le qui-vive, pour parer aux impondérables et aux surprises techniques diverses.

Cette situation était pourtant la norme et les filles elles-mêmes s’étonnaient de mon ébahissement.

Le travail des femmes, dans des métiers qui en Europe sont encore exclusivement masculin, fait partie ici depuis toujours, du coutumier.


la corvee d'eau
Corvee d'eau, une forme de pompe hydraulique sur pattes

Photo : Franz Grasser


La tradition du travail féminin relève d’une habitude ancestrale, commencée sous les Tsars, continuée allègrement par les bolcheviques, et rendue indispensable pendant et après la guerre 39/45 quand il fallait suppléer a l’absence des hommes partis au massacre.

Prenons quelques exemples historiques avant de glisser jusqu’à nos jours.


Travail des Femmes : Une Tradition et une Nécessité, nées sous les Tsars


le regard aussi dur que les mains sont calleuses
Cette Dureté cette Fixité dans le regard. Combien de luttes de Combats ?

1880. Une jeune paysanne aux mains de "vieille dame"


Le parcours pour les filles, commençait dès le plus jeune âge. Les filles de 7 à 12 ans s'occupaient de leurs jeunes frères et sœurs. Puis, eIles faisaient paître le bétail. EIles aidaient bien-sûr aussi au champ : ramassaient les pommes de terre, apportaient de la nourriture et des boissons aux adultes pendant leur ouvrage.

Elles étaient de corvée d’eau, rinçaient le linge, apprenaient à le coudre et à filer, pétrissaient et préparaient le lin et le chanvre.

corvee de fagot
Voilà une Va-Nu-Pieds typique

Steppes d'Astrakan près de la Volga, 1912-1913

Photo : Zakhary Vinogradov


Quant aux femmes adultes, leur travail ne se limitait pas à s’occuper des enfants et gérer les tâches ménagères. Beaucoup d’autres travaux leur incombaient en particulier aux champs. De nombreux domaines qui sont désormais considérés comme masculins, leurs étaient autrefois aussi dévolus.


Quelques exemples :

La Récolte. Province de Vladimir. Années 1910
Ah ça vaut toutes les séances de Fitness !

La Récolte. Province de Vladimir. Années 1910

Photo : Sergueï Lobovikov


L’arrosage du jardin potager, 1875-1876
Des Poids et Désaltère

L’arrosage du jardin potager, 1875-1876

Photo : Ivan Boldyrev


Femme cosaque réparant une vitre, 1875-1876
Les Chausses étaient Chères en temps de Main d’œuvre, il fallait les Economiser

Femme cosaque réparant une vitre, 1875-1876

Photo : Ivan Boldyrev


Récolte du fumier
Masques …. Déjà a cette époque ?

Récolte du fumier

Photo : Ivan Boldyrev


Dans certains cas, quand elles avaient totalement à charge la famille, les femmes ont occupé des emplois extrêmes. Par exemple, grâce au peintre Repin, nous connaissons les Haleurs de barges, qui travaillaient sur la Volga, mais tout le monde ne sait pas que les femmes se livraient également à cette activité divertissante.

Burlachki tirant une barge sur la rivière Sura, en 1910
Jamais contente. Elle Hale toute la journée.

Burlaki tirant une barge sur la rivière Sura dans la province de

Nijni Novgorod, 1910.

Photo de Z.Z. Vinogradov



Dessous, l’illustre tableau de Répin

Les Haleurs de Barges sur la Volga
J’en vois un qui tire au flanc !

Les Haleurs de Barges sur la Volga

Ilya Yefimovic Répin


La main-d'œuvre féminine était également largement utilisée pour la construction du chemin de fer. Ci-dessous, un instantané lors de la Première Guerre mondiale.

Au boulot les filles !
Ouaih le seul qui bosse c’est le photographe !

Photo : Sergueï Lobovikov, 1916



Pour les soins du bétail, si les hommes étaient orientés chevaux, le reste, les vaches, les moutons, les cochons, les oies et les poulets étaient exclusivement de la responsabilité des femmes.

le moment de la traite
Perrette et Son Potolait

Photo : William Carrick, 1860-1870


N’oublions pas de mentionner, la préparation de plats pour une famille nombreuse, pour laquelle il fallait aussi chauffer le poêle.

Et, bien sûr, n’oublions pas le lavage du linge et son entretien : ci-dessous, les lavandières au turbin

Début des années 1900. Les Lavandières
Et Tape et Tape sur ton Battoir !

Sur l'Ienisseï ou au Portugal ?. Début des années 1900. Les Lavandières

Source : Archives d'État du territoire de Krasnoïarsk


Mais avant que les vêtements ne soient lavés, ils doivent être taillés et cousus. Et pour les coudre, il faut tisser le tissu. Et pour le tissu, vous avez besoin de fil qu’il faut filer. Pour cela, vous devez planter et récolter du lin. Engrenage Infernal !

Les vêtements paysans, chausses comprises (Voir Article « Les Lapti, entre Sandales et Espadrilles ») étaient fabriqués à la maison, et ce, presque jusqu'au début du 20e siècle.

Tissage dans le village. Verkhne-Usinsky, 1916
Pour ce Textile que Tu Tisses : Tires-tu la Trame du Tissu ?

Tissage dans le village. Verkhne-Usinsky, 1916

Source : Archives d'État du territoire de Krasnoïarsk


Dans ce panoramique des activités journalières, il ne serait pas superflu d'évoquer aussi les accouchements métronomiques. Une femme donnera naissance à huit, voire dix, douze enfants, pour que trois ou quatre d'entre eux restent en vie.

Enfin une forme de délivrance définitive met fin au calvaire.

Vers le cimetière. Région d'Arkhangelsk
Dernière Promenade en Traineau

Vers le cimetière. Région d'Arkhangelsk



Femmes : les professions « lourdes » de l'ère de l'URSS

Après la grande fracture de la Guerre 39/45, n’ayant plus d’hommes pour produire, construire, cultiver, éduquer, l’état a mis à contribution ce qu’il lui restait de chair à user. Les femmes ont dû retrousser leurs manches pour pallier aux manques dans tous les domaines.

Cet appel aux femmes les a bien entendu confortées dans leur rôle central dans la société, impliquant des concessions par le pouvoir, au niveau des conditions de vie et de travail.

D’autant qu’on attendait d’elles de repeupler au plus vite le pays.

En fait, les femmes ont été ramenées dans les ateliers et aux taches rudes, dans des conditions pires que sous le tsarisme. Par exemple la maternité était désormais devenue un «devoir socialiste», mais en plus une femme se devait d’accomplir toutes les autres tâches incombant aux individus, comme Labourer, Œuvrer dans une Usine ou un Bureau, pour ne pas être considérée comme un «parasite».

C’est une forme particulière d’interprétation du concept de «droit au travail».

Dans l'URSS post-stalinienne, après 1953, les choses sont devenues plus souples et les conditions ont évoluées :

  • À partir du milieu des années cinquante, l'éducation est redevenue mixte,

  • L'avortement a de nouveau été autorisé,

  • En 1967 le concept de «pension alimentaire» a été introduit,

  • En 1968 – apparait le congé de maternité payé.


Remarque : le congé de maternité de plusieurs mois n’existait pas en fait, jusqu'à la toute fin de l'URSS. L'enfant était gardé dans des crèches organisées par l’état, et les femmes retournaient au plus vite au travail. Et surtout, pendant toutes les années de l'URSS, l'image d'une mère qui travaille a été officiellement promue. L'image idéale d'une femme soviétique était ainsi dépeinte : elle travaille à plein temps, accomplit les tâches ménagères, sert et plaît à son mari de toutes les manières possibles, lui prépare des plats chauds, résout tous les problèmes d’éducation des enfants et fait la lessive pour toute la famille. Elle emmène l'enfant en transports en commun vers les activités extra scolaires et j’oubliais : elle nettoie l'appartement. Ouf !




Par exemple, voici une photo d’ouvrières de l'usine de tabac de Chisinau, qui date de 1952.

Ouvrieres a la manufacture de Tabac
Chisinau ou Kishinev c’est le meme tabac Moldave


Voici ensuite un plan nettement publicitaire et mis en scène, mais les gamines sont au boulot, piqueur en main.

Construction du métro, 1934
Arme sur l’épaule et Sourire aux lèvres

Construction du métro, 1934.

Reproduction des actualités TASS



Une photo plus récente (années 80 ?) de la chaîne de montage AVTOVAZ.

Sur la chaîne de montage AVTOVAZ
Pas de Doute y’a des pièces en trop

Photo : Service de presse d'AvtoVAZ



Sur le toit de l'hôtel "Ukraine", Moscou, 1953

Sur le Toit, la mouche aux gros yeux noirs exhibe son dard d’un sourire salace :

Sur le toit de l'hôtel "Ukraine", Moscou, 1953.

Photo : Dmitry Baltermants



Dans l’atelier de fabrication :

Vétéran du travail socialiste

Tout à trac la trogne tragique et tourmentée de Mamie qui trime et turbine au tour

Vétéran du travail socialiste

Photo : Vladimir Lagrange



Le cliché ci-dessous, d’un naturel poignant.

Femmes avec des Beignets et une charrette de briques, 1981

Pousse ton portant pesant ma poussine, je porte les petits pains précieux

Femmes avec des Beignets et une charrette de briques, 1981.

Photo : Vladimir Vorobiev



Présentation de la Motrice, en vedette, au centre de l’image.

Transport souterrain de roches aurifères, années 1950

Montée en marche sur la machine, elle mate avec malice les manettes de la motrice qui meugle.

Transport souterrain de roches aurifères, années 1950


Hommes et Femmes devaient travailler très dur. N’oublions pas qu’en plus ils construisaient le monde Socialiste de demain.

brigade du travail communiste "Dorsantekhstroy"

Brigadier de la brigade du travail communiste "Dorsantekhstroy"

Photo: V. Myasnikov


Et ce, pas seulement dans les villes où l'industrialisation avait lieu, mais aussi dans les campagnes. Dans les fermes collectives, ou les gens travaillaient de l’aurore au crépuscule.

Déchargement de céréales, Région de Kouban, 1952

Déchargement de céréales, Région de Kouban, 1952.

Photo : Arkady Shaikhet

De grêles et graves greluches grattant a la griffe des grains gris, grimpées sur les tas, se grisant de leur glissement vers les grilles de la grange, comme gravats.



Par manque de bras masculins, les femmes effectuaient très souvent des travaux inattendus et complètement non féminin : ci-dessous des trapézistes en plein exercice.

taille des arbres dans le parc de l'Université d'État de Moscou, 1960.

Des femmes Corbeaux taillent les arbres dans le parc de l'Université d'État de Moscou, 1960.

Photo : Viktor Akhlomov



Voici le portrait d'une femme dompteur, en boulangerie. En regardant cette photo, on éprouve beaucoup de respect pour la peine exprimée, et on se souvient aussi du goût de ces beignets bien frais du rayon pain.

La boulangere au fournil

Femme furie au fournil, dans ses fripes frustes, effrayante enfarinée et pas frêle, elle fait front au froment et nous fricotte sans frayeur de frais frichtis fourrés-fraises.

La Main à la Pâte. 1981, à Novokouznetsk

Photo : Vladimir Sokolaev


Ci-dessous, une scène d’une belle intensité dramatique.

Maconnerie en couple

La Brave Biquette brosse et brise la brique sous les brimades du brigadier qui braille et la brocarde.

Plus Vite les Briques !



Vocation d’infirmière contrariée, on se rabat sur d’autres seringues :

Perce l'asphalte au marteau piqueur

Petit peuple Pique, pic et Pioche pile-poil sur la pierre, n’aie pas peur mais gare tes pieds

Le Lait Battu ça donne du Beurre



Evacuation des boues

Dans la Gadoue, la Gadoue, la Gadoue

« Du mois de septembre au mois d’août Faudrait des bottes de caoutchouc Pour patauger dans la gadoue, la gadoue, la gadoue »


Et enfin, je vous propose de jeter un œil sur la photo prise à Kazan en 1987, alors que le pays était déjà en Perestroïka, et que l'URSS vivait ses dernières années.

Les hommes a la biere et les femmes a l'asphalte
À chacun sa récompense

Certains ont eu une bière, et d’autres ont eu l'asphalte.

Photo : Roustam Moukhametzyanov


Bien-sur les conditions évoluent et les nécessités impérieuses de l’après-guerre se sont estompées, mais sans complexe les femmes sont toujours présentes dans de nombreux domaines ou on ne les attend pas. Dans notre maison des peintres femmes ont appliqué un enduit Provençal dans plusieurs pièces avec rapidité et bonne humeur.

Sur la photo ci-dessous, la chaine de montage est servie par hommes et femmes indistinctement.

Ligne de montage Avtovaz actuelle

Ligne de montage Avtovaz actuelle



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