A. S. Pouchkine "Conte de fées sur le Tsar Saltan, sur son fils, le glorieux et puissant Chevalier le Prince Gvidon Saltanovitch, et sur la belle Princesse Cygne".
Boite Laquée Peinte du village de Fedoskino
Voici un joli conte merveilleux, pour Noël, c’est le sujet d’un poème de Pouchkine, dans la grande tradition russe des écrits héroïques.
Païens, Religieux ou Moraux, ces contes et légendes constituaient le cœur des veillées, au grand bonheur des adultes et a l’effroi ou l’enchantement des enfants.
Dans cette veine, on trouve des héros par centaines : Ivan-Tsarevitch, Kot Baioun, Tchoudo Youdo, Vassilissa la Magique, Kachtchei, Sivko bourko, Baba Yaga, la princesse grenouille, Riaba la Poule, et cette tradition fut tout naturellement prolongée et revivifiée par de superbes Poèmes de Pouchkine, tels : Le Pêcheur et le Poisson, le Tsar Nikita et Quarante de ses filles, le Coq d’or, Rouslan et Ludmila.
Nous tenterons de temps à autre de vous en donner un aperçu.
L'Indiscret Tsar ou le Tsar Voyeur
Je vous propose un rendu très libre du Poème dont voici les 3 premières strophes sur les 1831 vers que compte le conte :
Trois filles sous la fenêtre
A deviser tard dans la soirée.
« Si j'étais une reine,
Dit une fille :
« C'est pour tout le monde baptisé que
Je préparerais un festin ».
« Si seulement j'étais une reine»,
Dit sa sœur :
«Je tisserais le lin
pour le monde entier »
«Si j'étais une reine »,
Dit la troisième sœur :
«Pour le Père Tsar
Je donnerais naissance à un héros ».
A peine a-t-elle parlé que
La porte grinça doucement
Et le roi entra dans la pièce.
Pendant toute la conversation
Le Souverain
Se tenait derrière la clôture ;
Du dernier discours surtout
Il est tombé amoureux.
« Bonjour, jeune fille rouge,
Dit-il : « sois une Reine,
Et donnes naissance à un héros
D'ici fin septembre.
Et Vous, chères sœurs,
Sortez de la pièce lumineuse
Et Suivez-moi »
Ma sœur et moi nous le suivons :
« Vous serez l'une de vous tisserande
Et l'autre cuisinière ».
Le roi-père sortit sous le dais.
Tout le monde est entré dans le palais.
Le roi ne se réunit pas longtemps :
Les noces ont lieu le soir même.
Tsar Saltan pour la fête des honnêtes
Il s’est assis avec la jeune Reine ;
Et puis les honnêtes invités
Sur un lit d'ivoire
Ont déposé les jeunes gens
Et ils les ont laissés tranquilles.
La cuisinière est en colère dans la cuisine
La tisserande pleure devant le métier à tisser,
Et elles envient
L'épouse du Souverain.
Et la Reine est jeune,
Choses à faire dans le futur sans reporter
Dès la première nuit que j'ai portée.
Version libre du conte Tsar Saltan :
Donc, il y a bien longtemps, dans un royaume lointain, trois sœurs papotaient près de leur fenêtre, imaginant ce qu'elles feraient si elles étaient mariées au Tsar Saltan. L'une d'elles dit qu'elle préparerait une grande fête avec des plats succulents, pour le monde entier. La suivante affirma qu'elle tisserait du lin pour le monde entier. La troisième déclara qu’elle donnerait au Tsar « un héritier, beau et courageux à nul autre pareil ».
Il se trouve que le Tsar, qui se promenait dans ses dépendances, passait à ce moment juste à l'extérieur de la clôture, et qu’il entendit la conversation. Il apprécia les paroles douces de la dernière jeune fille, il en tomba immédiatement amoureux, se présenta et lui demanda de devenir sa femme. Ils se marièrent le soir même et leur vint un fils quelques temps après.
Tsar Saltan à la Fenêtre
Les autres sœurs obtinrent des emplois de cuisinière et de tisserande.
Quelques mois plus tard, le Tsar partit en guerre et dut quitter son épouse bien-aimée. Alors qu'il était en campagne, la Reine, lui donna un nouveau fils.
Un cavalier fut envoyé au Tsar pour lui annoncer la bonne nouvelle. Cependant, les deux sœurs et une amie nommée Barbarika étaient si jalouses de la chance de la Reine, qu'elles firent enlever le cavalier et le remplaçèrent par leur propre messager, qui porta une note disant : « votre femme, la Reine, n'a enfanté ni un fils ni fille, ni souris ni grenouille, mais a donné naissance à une petite créature inconnue ».
Lorsqu'il lut ce message, le Tsar mortifié a renvoyé une lettre disant à sa femme d'attendre son retour avant d'agir.
Les sœurs intrigantes rencontrèrent le cavalier sur le chemin du retour, le saoulèrent copieusement et remplacèrent la véritable lettre du Tsar par une fausse lettre ordonnant que la Reine et son bébé soient placés dans un tonneau et jetés à la mer.
Tant va le Tonneau à l’eau
Il était impossible de désobéir à un ordre du Tsar, alors malgré l’atrocité de ce qu’ils accomplissaient, les gardes du palais placèrent la Reine et son fils dans un tonneau, qu’ils roulèrent vers l’eau.
Alors que la Reine pleurait et se lamentait à l’intérieur du tonneau, son fils devenait plus fort, non pas de jour en jour, mais de minute en minute. Avec force, il supplia les vagues de les emporter vers la terre ferme. Les vagues obéirent et lui et sa mère s’échouèrent sur une île déserte.
A peine sortis de leur prison flottante, ils avaient très faim, alors le fils fabriqua un arc et des flèches, en utilisant des branches d'arbre, et partit à la chasse. Non loin de là, il entendit un cri et aperçut un pauvre Cygne luttant contre un énorme faucon noir. Au moment où le faucon était sur le point d’enfoncer son bec dans le cou du Cygne, le jeune homme décocha une flèche, tuant le faucon et répandant le sang de l’oiseau.
Il est de bon Aloi que l’Oie fasse la Loi
C'est en fait un Cygne du Destin.
Le Cygne blanc s’approcha du garçon, le remercia et lui dit : « Tu n'as pas tué un simple faucon, mais un méchant sorcier. Pour m’avoir sauvé la vie, je te servirai pour toujours ».
Le fils retourna aussitôt auprès de sa mère et lui conta son aventure, puis malgré la faim qui les tenaillait, ils s'endormirent tous les deux profondément.
Le lendemain matin, à leur réveil, ils virent, dressée devant eux, une ville merveilleuse, là où il n’y avait rien auparavant !
La Cygne, de la Main, guida son Gvidon vers la Cité-ile
Ils s’émerveillèrent devant les dômes dorés des monastères et des églises s’élevant derrière les murs blancs de la ville. "Mon Dieu, regarde tout ce que le Cygne a fait !" pensa le garçon.
Ils entrèrent dans la ville et des foules de gens les saluèrent profondément et couronnèrent le jeune homme, le proclamant Prince Gvidon.
Ivan Bilibin : L’Ile de Buyan.
A quelque temps de la, un navire marchand naviguait près de l'île lorsque ses marins aperçurent l'étonnante ville fortifiée.
La ville permit au navire d’accoster. Le Prince Gvidon les accueillit et leur offrit à manger et à boire. Il leur demanda ce qu'ils avaient à vendre et où ils allaient. « Notre commerce porte sur les fourrures », lui répondirent-ils, « et nous passons par l'île de Buyan puis nous nous rendrons jusqu'au royaume du Tsar Saltan ».
Gvidon demanda aux marchands de transmettre ses respects au Tsar, même si sa mère lui avait parlé bien auparavant, de la lettre qui avait conduit à leur expulsion de leur royaume.
Le Prince Gvidon ne voulait prendre en considération que le meilleur des gens et n'avait jamais vraiment pu croire que son père pouvait avoir voulu une telle ignominie.
Alors que les marins s'apprêtaient à quitter l'île, le Prince devint triste en pensant à son père. "Pourquoi es-tu si sombre ? » dit le Cygne. « Je souhaite tellement voir mon père, le Tsar", répondit Gvidon.
Alors, d'un simple jet d'eau, le Cygne transforma le prince en un petit moucheron, afin qu'il puisse se cacher dans une fente du mât du navire en route vers le royaume du Tsar.
Ivan Bilibin : Le Vol du Moustique.
Lorsque le navire arriva au royaume du Tsar Saltan, celui-ci salua les marchands et leur demanda de lui raconter leurs aventures et lui décrire les terres qu'ils avaient visitées.
Ivan Bilibin : Les Marchants en visite auprès du Tsar Saltan.
Les marins expliquèrent au Tsar ce qu’ils avaient vu de cette île et de la ville fortifiée et parlèrent de l'hospitalier Prince Gvidon. Le Tsar ne savait pas que ce Prince Gvidon était son fils, mais il exprima le souhait de voir cette belle ville.
Ivan Bilibin : L’Oie Couronnée.
Mais les deux sœurs et la vieille Barbarika ne voulaient pas laisser partir le Tsar et faisaient comme s’il n’y avait rien d’étonnant dans ce récit des marins. « Il y aurait » disaient-elles « de l’extraordinaire s’ils avaient vu, un écureuil assis sous un sapin, cassant des noix dorées contenant des émeraudes pures et chantant une chanson ».
Le Tsar et ses Perfides Conseillères
En entendant ces arguties, le moucheron, Prince Gvidon, se mit en colère et piqua l'œil droit de la vieille mégère.
Après son retour dans l'île, Gvidon raconta au Cygne l'histoire qu'il avait entendue à propos d’un remarquable écureuil.
Puis le Prince entra dans sa cour et là, il y avait comme par enchantement un écureuil chantant, assis sous un sapin, cassant des noix dorées !
Le prince s'en réjouit fort et ordonna qu'une maison de cristal soit construite pour le petit animal. Il plaça un garde pour surveiller et ordonna à un scribe d'enregistrer et compter chacune des émeraudes. Bénéfice pour le prince, honneur pour l'écureuil !
Scribe et Garde pour l’Ecureuil dans son Abri doré
Quelque temps plus tard, un deuxième navire faisant route vers le royaume du Tsar, arriva sur l'île, et le Prince dit à nouveau au Cygne qu'il souhaitait revoir son père. Cette fois, le Cygne transforma le prince en mouche pour qu'il puisse se cacher dans le navire.
Dès leur arrivée à destination, les marins ont parlé au Tsar Saltan du merveilleux écureuil qu'ils avaient vu.
Noisettes Vertes Emeraude
Saltan voulut à nouveau visiter cette ville légendaire mais en fut dissuadé lorsque les deux sœurs et Barbarika ridiculisèrent l'histoire des marins et parlèrent d'une merveille plus grande : « trente-trois beaux jeunes chevaliers, menés par le vieux Chernomor, surgissant de la mer déchaînée ». La mouche, Gvidon, se mit en colère contre les femmes et piqua l’œil gauche de Barbarika avant de s’échapper.
De retour chez lui, il parla au Cygne du vieux Tchernomor et des trente-trois chevaliers, et déplora de n'avoir jamais vu une telle merveille. "Ces chevaliers viennent des eaux profondes que je connais", dit le Cygne. "Ne sois pas triste, car ces chevaliers sont mes frères et ils viendront à toi."
Les Chevaliers émergeant de l’onde
Un peu plus tard ce même jour, le prince grimpa sur une tour de son palais et regarda la mer. Soudain, une vague géante s'éleva haute sur le rivage, et lorsqu'elle se retira, trente-trois chevaliers en armure, menés par le vieux Chernomor, émergèrent, prêts à servir le Prince Gvidon. Ils lui promirent qu'ils sortiraient de la mer chaque jour pour protéger la ville.
Le Vieux Chernomor guidant ses Chevaliers
Quelques mois plus tard, un troisième navire arriva sur l'île. Comme à son habitude, le Prince accueillit à nouveau les marins et leur dit d'adresser ses respects au Tsar. Alors que les marins se préparaient pour leur voyage, le Prince dit au Cygne qu'il n'arrivait toujours pas à se débarrasser de l’envie de voir son père et qu'il le souhaitait ardemment. Cette fois, le Cygne transforma le Prince en bourdon.
Le navire arriva dans le royaume et les marins racontèrent au Tsar Saltan la ville merveilleuse qu'ils avaient vue et comment chaque jour trente-trois chevaliers et le vieux Chernomor émergeaient de la mer pour protéger l'île.
Le Tsar s'en émerveilla et voulut voir cette terre extraordinaire, mais une fois de plus les deux sœurs et la vieille Barbarika l’en dissuadèrent. Elles minimisèrent l’histoire des marins et dirent que ce qui serait vraiment étonnant, c’est qu’au-delà des mers vivrait une princesse si magnifique qu’on ne pourrait la quitter des yeux. « La lumière du jour pâlirait devant sa beauté, les ténèbres de la nuit en seraient tout éclairées, et que quand elle parlerait, ce serait comme le murmure d'un ruisseau tranquille. Voilà ce qui serait une vraie merveille ! ».
Gvidon, le bourdon, se mit de nouveau en colère contre les femmes et piqua Barbarika au nez. Elles tentèrent en vain de l’attraper.
Le Vol du Bourdon
Après son retour, Gvidon se promena jusqu'au bord de la mer jusqu'à ce qu'il rencontre le Cygne blanc. « Pourquoi êtes-vous si sombre cette fois ? » » demanda le Cygne. Gvidon répondit qu'il était triste parce qu'il n'avait pas d’épouse.
Gvidon Morose voit partir les Marchands
Il raconta l'histoire qu'il avait entendue de la belle princesse dont la beauté illuminait les ténèbres, dont les paroles coulaient comme le murmure d’un ruisseau. Le Cygne resta silencieux pendant un moment, puis dit qu'il existait une telle princesse. "Mais une épouse", poursuivit le Cygne, "n'est pas un gant qu'on peut simplement jeter de la main." Gvidon déclara qu'il comprenait mais qu'il était prêt à marcher le reste de sa vie et jusqu’aux quatre coins du monde à la recherche de la merveilleuse princesse. A cela, le Cygne soupira et dit :
Pas besoin de voyager, inutile de vous fatiguer. La femme que tu désires, la princesse, c'est moi.
Fais moi un Signe
Sur ces mots, le Cygne battit des ailes et se transforma en la belle fille dont le prince avait entendu parler. Ils s'embrassèrent passionnément, et Gvidon l'emmena a la rencontre sa mère. Le prince et sa belle se marièrent le soir même.
Peu de temps après, un autre navire arriva sur l'île. Comme d'habitude, le prince Gvidon accueillit les marins et, au moment de partir, il leur demanda de présenter ses salutations au Tsar et de lui transmettre une invitation à lui rendre visite. Heureux avec sa nouvelle épouse, Gvidon avait décidé de ne pas quitter Buyan cette fois.
Lorsque le navire arriva au royaume du Tsar Saltan, les marins racontèrent ce qu’ils avaient vu sur l'île fantastique : l'écureuil chanteur cassant les noix d'or, les trente-trois chevaliers en armure surgissant de la mer et le charmante princesse dont la beauté était incomparable.
Cette fois, le Tsar n'écouta pas les remarques sarcastiques des sœurs et de Barbarika. Il appela sa flotte et mit immédiatement le cap sur l'île.
Lorsqu'il atteignit l'île, le prince Gvidon était là pour le rencontrer. Sans rien dire, Gvidon le conduisit au palais avec les deux belles-sœurs de la Reine et Barbarika. En chemin, le Tsar vit tout ce dont il avait tant entendu parler.
Aux portes se trouvaient les trente-trois chevaliers et le vieux Chernomor qui montaient la garde. Là, dans la cour, se trouvait aussi un écureuil remarquable, chantant une chanson et rongeant une noix dorée.
Beau Père, je suis ta Bru !
Dans le jardin, l’attendait la belle Princesse, épouse de Gvidon.
Et puis le Tsar vit quelque chose d’inattendu : à côté de la Princesse se tenait la mère de Gvidon, son épouse disparue depuis longtemps. Le Tsar la reconnut immédiatement. Les larmes coulant sur ses joues, il se précipita pour l'embrasser, et des années de chagrin furent immédiatement oubliées. Il réalisa alors que le prince Gvidon était son fils, et les tous deux se jetèrent dans les bras l’un de l’autre.
Une grande et joyeuse fête eu lieu. Les deux sœurs et Barbarika s’étaient cachées, honteuses, mais furent finalement retrouvées. Elles fondirent en larmes, avouant tout. Mais le Tsar était si pleinement heureux qu'il les laissa partir.
Le Tsar et la Reine, le Prince Gvidon et la Princesse vécurent le reste de leurs jours dans le bonheur.
PS : Bon d’accord la logique n’est pas très grande car a bien y regarder la Reine eut 2 fils, mais où est donc passé le second ??
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