L'escadrille Normandie-Niemen est un groupe d'aviateurs français de la France Libre (FAFL), incorporés dans l'armée de l'air soviétique, qui ont combattu les troupes Nazo-Allemandes pendant la Seconde Guerre mondiale de 1942 à 1945, guerre appelée ici en Russie, « la Grande Guerre Patriotique ».
Ecusson de l’Escadrille
À la suite de la déclaration de guerre de l'Allemagne à l'URSS le 22 juin 1941, l'ambassade de France à Moscou, obéissant à Vichy, est fermée. Mais l'attaché militaire français de l'ambassade, le lieutenant-colonel Luguet, profite de l’escale d’Istamboul pour fausser compagnie à la diplomatie vichyste, avec pour dessein de rallier la France libre.
Voici le blason de la Normandie par comparaison :
Coté Londres :
À son arrivée à Londres, fin 1941, il livre au capitaine Mirlesse, du 2e bureau des Forces aériennes françaises libres, son analyse du front de l’Est. La guerre est entrée dans une phase d’usure et malgré les graves défaites du début de l'affrontement avec l'Allemagne, il est persuadé que l’issue tournera à l’avantage des Soviétiques.
Les deux hommes convainquent le Général de Gaulle d’envoyer une force combattante française en URSS. Pour le fondateur de la France libre, l’enjeu d’une telle démarche ne se limite pas au plan militaire. Il y entre aussi d’incontestables considérations politiques.
Par cette présence française, fût-elle symbolique, De Gaulle souhaite, aux yeux des Soviétiques qui l’ont reconnu comme chef de tous les Français libres, combler le vide laissé par la fermeture de la représentation de Vichy à Moscou.
En outre, n’envisageant pas d’autre issue à la guerre que la victoire finale des Alliés, il entend ainsi se positionner en vue des discussions de l’après-guerre, et cette présence française aux cotés des Soviétiques renforcerait la stature politique des gaullistes face aux Britanniques et aux États-Unis, volontiers hautains et méfiants et méprisants.
L’idée admise, fut proposée aux instances Soviétiques.
L'unité était vouée à attirer beaucoup d'attention.
Coté Moscou :
«Staline avait réalisé que le tandem Londres-Washington, avait besoin d'un contrepoids», soutient Natalia Tatartchouk, historienne spécialisée dans l'étude des relations entre la Russie et la France.
C'est pourquoi le Kremlin a soutenu le personnage De Gaulle comme représentant de la France pendant la guerre, prenant le contre point des alliés, qui eux ne se pressaient pas d'accepter le statut du général.
Les combattants de Normandie-Niemen symbolisaient le soutien de Staline à de Gaulle.
L'approche de Staline vis-à-vis du général et de la France était importante pour Paris. Quand la guerre fut finie, la France se retrouva parmi les puissances victorieuses. Le soutien de Staline a assuré la place de la France au Conseil de sécurité de l'Onu. Aux États-Unis, le Président Roosevelt avait initialement conçu le groupe des membres permanents de l'Onu, sans la France.
Au moins deux raisons supplémentaires ont poussé les dirigeants soviétiques à regarder de près l'escadron français et ont amené le groupe de chasse au centre de la politique internationale.
Tout d’abord, les deux premières années de la guerre, ont été les plus difficiles pour l'URSS, et derrière le positionnement politique, émergeaient des « considérations militaires ». La perspective envoyer des pilotes français sur le front, intéressait Moscou. L'Union soviétique avait besoin de toute aide militaire possible.
De plus, quand Staline soutint l'idée de de Gaulle de créer une unité militaire française sur le front russo-allemand, les alliés ne luttaient pas encore contre les nazis en Europe, l'URSS était seule et tentait, par tous les moyens, d’attirer les troupes britanniques et américaines sur le continent.
Dans ce contexte, « Normandie-Niemen a fourni une présence visible des alliés sur le front russe », a déclaré (à Russia Beyond), le recteur de l'Institut d'État des relations internationales de Moscou, Anatoli Torkounov. Moscou a ainsi voulu rendre visible et concrète la coopération militaire avec les alliés.
Le Début des Opérations :
Sous les ordres du commandant Pouliquen, le groupe de chasse n° 3 est créé le 1er septembre 1942. Constitué à Rayak, au Liban, il prend le nom de "Normandie". Le 12 novembre 1942, les soixante volontaires du groupe, pilotes et mécaniciens, s'embarquent pour l'Union soviétique via Bagdad, Bassorah et Téhéran, destination : Ivanovo, une base aérienne située à 200 km au nord-est de Moscou.
Après avoir testé les différents types d'appareils (dont certains anglais ou américains) proposés par le commandement soviétique, le commandant d'unité Jean Tulasne et son adjoint le capitaine Albert Littolff arrêtent leur choix sur le Yak soviétique, ce qui va droit au cœur de leurs hôtes.
Les aviateurs français s'entraîneront et combattront sur le chasseur soviétique Yak-1, puis sur la version Yak-3.
Escadrille de Yak 1
Agence TASS
Peloton de Pilotes en Pelisse
Le 5 avril 1943, l'escadrille est engagée dans les combats, avec pour mission d'escorter des bombardiers entre Roslavl et Smolensk. Après avoir essuyé les tirs de la DCA ennemie, elle est attaquée par une patrouille de chasseurs.
Au cours du combat qui s'ensuit, deux de ses pilotes, Preziosi et Durand, lui donnent ses deux premières victoires en abattant chacun un Focke-Wulf 190. Cette première mission est un succès :
- Grâce au soutien de l'escadrille française, les bombardiers soviétiques rentrent à la base sans avoir subi aucune perte.
Dès lors, le groupe est régulièrement engagé dans les opérations de combat.
Polotniani-Zavod, premier terrain de guerre du "Normandie", 22 mars 1943
Source : Collection du musée de l'Ordre de la Libération
Mécanos au Boulot
Huit jours plus tard, ce sont de nouvelles victoires. Au cours d'une mission de chasse dans le secteur de Spas-Demensk, six appareils des patrouilles françaises, attaqués par des forces supérieures en nombre, abattent trois chasseurs allemands. Ce jour-là est toutefois également jour de deuil, l'escadrille déplore ses trois premières pertes : les lieutenants Derville et Poznanski et l'aspirant Bizien ne rentrent pas de mission.
Le parcours du "Normandie-Niémen"
© MINDEF/SGA/DMPA/Joëlle Rosello
À partir du 16 avril, les Français gagnent Mosalsk, situé à quelque 40 km des lignes. Les Missions d'escorte, les attaques de colonnes et d'aérodromes allemands se poursuivent. L'unité est désormais intégrée à la 303e division aérienne de chasse sous les ordres du général Zakharov (1re armée aérienne, 3e front de Biélorussie).
L'année 1943 est particulièrement meurtrière pour ces hommes. Après les six premiers mois de combats, vingt-et-un pilotes sont morts, prisonniers ou disparus, quatre autres sont blessés. Le 6 novembre, le groupe, qui compte alors plus de soixante-dix victoires, se replie à Toula pour l'hiver.
Au cours de l'hiver 1943-1944, l’unité est réorganisée. Cinquante-deux nouveaux pilotes, venus d'Afrique du Nord, arrivent en renfort. Le groupe est porté à quatre escadrilles. Fin mai, le régiment est de retour sur le front.
En juin, il participe au soutien de l'offensive soviétique en Biélorussie puis en Lituanie. En moins de trois semaines, les troupes soviétiques progressent de plus de 400 km vers l'ouest.
Mécaniciens français et russes autour d’un Yak 1 à Kozelsk en Juin 1943
Source : Musée de l’Ordre de la Libération
En juillet, le groupe prend part à la bataille de franchissement du Niémen, assurant la protection des troupes soviétiques. L'Armée rouge parvient à ouvrir une brèche de plus de 200 km de large sur 50 de profondeur dans les lignes adverses. Pour ses actions d'éclats, "Normandie" reçoit du commandement suprême soviétique le titre de "Régiment du Niémen", comme il est de tradition dans l’armée Russe, devenant ainsi le "Normandie-Niémen".
YAK 9 Camouflés, Doubrovka, en Juillet 1944
Source : Musée de l’Ordre de la Libération
Le 16 octobre 1944, l'offensive de Prusse commence. En une seule journée, le régiment, équipé de Yak 3, abat vingt-neuf appareils, sans éprouver aucune perte. Après une semaine de combats, les premiers éléments soviétiques franchissent les lignes allemandes.
Le 1er juin 1945, le régiment rentre à Moscou, et les pilotes du "Normandie-Niémen" apprennent que l'URSS offre à la France les quarante Yak 3 sur lesquels a volé le régiment.
Le 15 juin, aux commandes de leurs appareils, ils s'envolent vers la France et après des escales à Prague, Stuttgart et Saint-Dizier, ils arrivent le 20 au Bourget pour recevoir un accueil triomphal.
Accueil triomphal des pilotes de retour en France, Le Bourget, juin 1945
Source : Collection du musée de l'Ordre de la Libération
Résultats des Combats :
Après plus de 5 000 sorties et 869 combats, le régiment "Normandie-Niémen" totalise 273 victoires homologuées, 37 probables. Quarante-six pilotes sont morts ou disparus sur les quelque cent qui ont successivement fait partie de ses rangs.
De la composition initiale du groupe, seuls trois pilotes ont survécu. Quatre des pilotes ont obtenu les plus hautes récompenses soviétiques, ils sont devenus "Héros de l'Union soviétique", le plus haut titre honorifique et le degré suprême de distinction, rare pour les étrangers.
Marcel Albert (1917 — 2010).
Roland de la Poype (1920— 2012).
Jacques André (1919 — 1988).
Marcel Lefevre (1918 — 1944).
Cité onze fois, le "Normandie-Niémen" a été décoré de la Légion d'honneur, de la Croix de la Libération, de la Médaille militaire, de la Croix de guerre avec six palmes, ainsi que des ordres soviétiques du Drapeau rouge et d'Alexandre Nevski.
Après la guerre, le groupe n'est pas dissout. De 1945 à 1947, de groupe de chasse équipé de ses Yak 3, il reçoit des Mosquito anglais.
D'octobre 1949 à mai 1951, il participe à la guerre d'Indochine (1946-1954).
En décembre 1951, le groupe part pour Oran, en Algérie, où il reçoit, en juin 1952, son premier chasseur à réaction, le "Mistral".
Le 3 juillet 2009, l'escadron est officiellement mis en sommeil. Le Musée Normandie-Niemen, installé aux Andelys, dans l'Eure, fermera définitivement ses portes à la fin de l'année 2010, ses collections étant reprises par le Musée de l'Air et de l'Espace, au Bourget.
Le Musée des Andelys
Mirage F1 et Yak 3 pour les 70 ans de l’Escadron
En Guise de Conclusion :
Après la défaite du nazisme, le Normandie-Niemen est resté un symbole important de la coopération soviétique et française malgré le contexte de la guerre froide ou peut-être, au contraire, à cause de lui.
Normandie-Niemen rappelait que « l'URSS avait un soutien dans le monde occidental et capitaliste ». La France était également importante pour l'Union soviétique parce que le Parti Communiste français était le deuxième plus puissant d’Europe, après le Parti Communiste italien.
Aujourd’hui, en ces temps passablement troublés par des vents de dissension venus de l’ouest, ne nous laissons pas perturber par des propagandes diverses et gardons l’œil vers ce que doit être et sera, dans le futur notre relation avec la Russie.
* De Hauts Faits et la Légende :
Le 15 juillet 1944 : victime d’une fuite de carburant, le lieutenant Maurice de Seynes regagne précipitamment le terrain de Doubrovka d’où il a décollé quelques minutes plus tôt. Aveuglé par les vapeurs d’essence qui envahissent son cockpit, il tente vainement à plusieurs reprises de se poser. Les Soviétiques lui ordonnent de sauter.
On fait Equipe, jusqu’à la Mort
De Seynes refuse car il ne veut pas abandonner à une mort certaine son mécanicien Vladimir Bielozoub qu’il a embarqué à l’arrière de son avion, comme cela se fait couramment pour les courts trajets d’un terrain à l’autre. Et Bielozoub, lui, n’a pas de parachute...
Après plusieurs autres tentatives infructueuses, le Yak 9 s’écrase et explose, tuant ses deux occupants.
L’aristocrate parisien et le paysan de la Volga ont été enterrés l’un à côté de l’autre à Doubrovka. Le sacrifice de Maurice de Seynes a un retentissement énorme en URSS et va entrer dans les livres d’Histoire comme symbole de l’amitié indéfectible entre la France et la Russie.
* L’Avion des Héros :
Dans ses versions successives, Yak 1, Yak 9, et Yak 3, ce petit chasseur en toile et duralumin, rustique, mais très maniable, satisfera toujours les pilotes français dans leur lutte avec les pilotes allemands montés sur leurs Messerschmitt 109 et Focke-Wulf 190, entièrement métalliques.
Y’a qu’un Yak 1
* Pour marquer le souvenir :
Et pour prouver s’il en était besoin, la fidélité des Russes, voici
le Restau Normandie-Niemen. Le nom reste ici porteur et symbolique dans les esprits et dans les Cœurs.
Un Barde dans le Restaurant Normandie-Niemen à Moscou
Un Film fut réalisé en 1960, avec une pléiade d’acteurs connus dont plusieurs français parmi lesquels Gianni Esposito. Le film a fait 30 millions d’entrées en Russie.
Scène du film Normandie-Niemen
Un Monument a été érigé à Ivanovo,
ou se sont rassemblés les premiers éléments de l’escadrille en 1942
Le Fier Volant et son Mécano
Pour les amoureux d’histoire et Fan de cette page extraordinaire, voici où se trouve Ivanovo, a 200 km au Nord Est de Moscou
Doc. Google Map
* Les Tombes des Pilotes tombés au combat :
Ci-dessous, les tombes des pilotes du régiment Normandie-Niémen au cimetière Vvedensky à Moscou.
Dans les années 1950, des proches de certains pilotes français ont décidé de réenterrer les pilotes chez eux, mais il reste plusieurs tombes intactes :
Celle du lieutenant principal Bruno de Faletans et du mécanicien Serguei Astakhov, morts dans le même avion. Les proches de Bruno de Faletans ont décidé de les laisser allongés l'un près de l'autre.
Les sépultures d'Edmond Mirovov, décédé en 1943, et de Georges Kurdu, décédé dans l'un des hôpitaux de Moscou en 1946, ainsi que celle du vétéran Levens Andrew, décédé en 1961.
Monument Mémoriel
Pilote Français non Identifié
Sources :
Merci a Bernard Lemaire Groupe FB, "Russie, un pays Méconnu"
Article de Jean-Charles Stasi dans Herodote.net, media de l’histoire
Russia Beyond : https://fr.rbth.com/tag/normandie-niemen
Lien vers les articles très nombreux consacrés par Russia-Beyond à ce sujet, entre les Hommages, Commémorations, Expositions, Histoires, Reconstitutions, Timbres postaux, et projet de film avec Depardieu, etc, prouvent que le souvenir reste très vivace.
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